Hello monde!
Bon, j'arrive un peu comme un cheveu sur la soupe, je saute la case de la présentation et j'arrive directement pour le plat principal, mais un forum est fait pour discuter, donc je me dis que vous saurez lire (ou ne pas lire) mon avis pour ce qu'il est, sans faire cas de ma cavalierie. Si ce terme existe, ce qui n'est pas sûr. Mettons qu'il existe, mon dictionnaire est sous une pile de livres que je n'ai pas envie de soulever.
Je me permets de revenir quelques messages en arrière, à ce passage écrit par Kraken:
kraken a écrit:
les images sont pas mal, je trouve, on ça fait plus penser à un film d'aventure qu'à un film d'action, et Dragonball, c'est de l'aventure avant tout.
Piccolo, lui, fait bien démoniaque (il semble certes pas très vert, mais ça vient peut être de la luminosité de la pièce, très jaune).
Sinon dans les critères que tu cite pour un bon scénario, il manque sur dragonball la capacité à se renouveler, et aussi l'évolution des personnages (assez très lente voire inexistante à partir de freezer), tout les arcs du scénario se ressemblent et sont ultra prévisibles (j'arrivais à prévoir le scénario tout environ 1 tome à l'avance).
Dragonball a un très bon univers très riche et cohérent, certes, mais une histoire minable (et un humour gamin pour completé ça)
Tu as cité les tintin, mais les tintins sont bouuré de rebondissement et l'intrigue est dur à prévoir et ça se renouvelle comme tu le dit, resultat, c'est excellent.
Bon, je vais pinailler et faire un foin autour de rien, mais c'est là une bonne partie de l'intérêt des discussions autour d'oeuvres, non?
Tout d'abord, Kraken - je me permets de m'adresser directement à toi puisque ce que je vais dire là tout de suite maintenant ne concerne que toi -, c'est quoi le truc? T'as des actions à la Fox, ou un truc comme ça? C'est tellement dingue que c'est sincèrement drôle, à chaque photo plus pourrie que la précédente qui filtre du film, tu es un peu plus sûr de la qualité de la chose qui nous attend. Surtout, le plus drôle, c'est que tu ne sembles même pas sûr de la qualité du film, mais de celle de
l'adaptation! Je ne fais cela dit que m'étonner, je ne suis pas d'humeur à démonter ce film ce soir, je pense que la pellicule le fera très bien toute seule le moment venu...
En fait, je suis d'humeur à défendre Dragon Ball le manga contre les critiques que tu lui opposes; simplement parce que Dragon Ball est pour moi une oeuvre majeure du vingtième siècle, et que je dis ça sans que ce soit une simple fantaisie culturelle. De par son fond et son impact, je pense que Dragon Ball a plus influencé notre génération dans son ensemble que la plupart des grandes oeuvres littéraires du siècle.
C'est d'ailleurs cet impact majeur (et, je pense, indéniable: je ne sais pas en quelle année tu es né, moi je suis de 1984, et je peux t'assurer qu'au collège, c'était la folie furieuse, et ce dans tous les milieux socio-culturels) qui me fait douter du bien-fondé d'une partie de tes arguments contre Dragon Ball.
Encore une fois, j'ignore ton âge, mais même si, comme moi, tu as suivi Dragon Ball alors qu'il était encore en pleine publication, tu devais, comme nous tous, avoir une réception en plusieurs temps de cette saga.
Tout d'abord, la rumeur, partout, dans les "cardass" qui circulaient dans la cour de récré, dans les pages des Dorothée Magazines, dans les bouches des mecs de la 5ème2 ou de la classe de monsieur Rano qui juraient avoir vu la gueule du nouveau méchant et que "oui mon vieux, juré, Songoku se transforme en SS3 dans quatre épisodes". Cette rumeur était partout, tellement le phénomène était important en France à partir de l'arc Cell, et fait, à mon sens, partie intégrante de l'entité "Dragon Ball", même si pas de l'oeuvre elle-même.
Ensuite, pour les chanceux, il y avait le manga japonais, que personne ne comprenait, mais qui permettait de voir à l'avance certains détails.
Ensuite, il y avait le dessin-animé le mercredi matin à 10H20, forme fortement viciée de l'histoire originelle, mais gros du phénomène en France.
Enfin, seulement en quatrième temps, il y avait le manga traduit (car sauf si tu es Japonais ou si tu avais à l'époque déjà une vingtaine d'années, je doute que tu aies pu saisir tous les dialogues dans la version japonaise).
Ceci posé, je vais partir de deux présupposés différents pour démonter la valeur du fait que "tu pouvais prévoir le scénario un tome en avance":
1) tu suivais Dragon Ball à l'époque de sa publication. Auquel cas, je suis prêt à parier ma main que tu rentrais dans le cadre des différents temps de réception dont je parle plus haut. Donc le fait que tu pouvais prévoir l'histoire à l'avance n'avait rien d'étonnant: c'était notre cas à tous. Gotenks était connu des fans bien avant la publication du volume 40, je ne parle même pas de Songoku SS3, et je me rappelle même que nous connaissions les Cell Juniors et Dabra en avance grâce aux jeux de la Super Nintendo. Il n'y avait aucunement matière à la surprise, pour personne, et pourtant, nous étions tous devant l'écran (avec un temps de différé et un magnétoscope, car nous avions SVT et histoire-géo, le mercredi matin!), et nous faisions de Dragon Ball le premier ultra-succès commercial en France d'un manga. L'intérêt de l'histoire de Dragon Ball n'était pas la surprise, je crois, mais c'est un autre sujet, restons collés à mon argumentaire pour le moment.
Dans ce présupposé, tu conviendras que le fait que "tu pouvais tout prévoir un tome en avance" n'a aucune valeur, puisque tu ne prévoyais en fait rien: tu savais.
2) pour une raison X ou Y (ton âge, ou le fait que tu vivais dans une grotte coupée du monde en 94-95), tu as découvert Dragon Ball après sa publication (le présupposé selon lequel tu l'as découvert avant n'existe pas, à moins que ta mère s'appelle Bulma et que ton mentor ait perdu un bras puis la vie contre des cyborgs vicieux). Dans ce cas de figure, je pense toujours que ton argument n'est pas valable. En France, Dragon Ball a influencé durablement et en profondeur nos manières d'envisager les histoires d'imaginaire populaire, et plus précisement les mangas, et même si par solitude extrême tu n'as été mis au courant d'aucun détail de l'intrigue avant de le lire dans le manga, je suis persuadé (là pour le coup c'est une certitude, pas une constatation) que ton inconscient avait déjà emmagasiné la tournure propre à Dragon Ball. Tu fréquentes ici un forum qui, s'il se veut généraliste, est cependant assez orienté imaginaire, jeux vidéo et animation japonaise. Je pense que tu n'es pas là par hasard. Or, une bonne partie de l'imaginaire japonais contemporain doit quelque chose à Dragon Ball, qui devait déjà pas mal à d'anciennes légendes internationales (je ne fais pas ici référence au Roi des singes, référence initiale de Dragon Ball, bien vite oubliée, mais plutôt aux idées diffuses des Chevaliers de la Table Ronde, ou de la mythologie nordique). Je pense donc, dans ce présupposé, que le fait que tu "prévoyais l'intrigue à l'avance" ne signifiait en fait qu'une chose: que la dite intrigue était en fait déjà autour de toi avant ta lecture, imprégnant d'autres de tes lectures, d'autres oeuvres que tu as parcourues.
Voilà pour le premier argument. Mais comme je risque de ne pas passer souvent sur Eltanin, je compte bien remplir ce message, donc ce n'est pas fini!
Tu reproches à Dragon Ball son incapacité à se renouveller, le côté téléphoné de son intrigue. Là encore, je pense que cette critique ne peut avoir de sens que mise dans un certain cadre de lecture.
En tant que série étalée sur dix ans, Dragon Ball peut en effet donner l'air de se répéter, de jouer en boucle le même film en se contentant de changer légèrement le casting.
Sauf qu'aujourd'hui, Dragon Ball est terminé, et que si son mode de perception initiale aura forcément toujours une certaine importance dans son analyse sérieuse (je pourrais développer son rôle de symptôme d'une émancipation des cités de banlieue parisienne, par exemple, si ça intéresse quelqu'un), il convient d'analyser son contenu propre comme un bloc terminé, une oeuvre bouclée.
Et là , putain, j'envie à mort un mec qui va se lire toute la série d'une traite pour la première fois!
RIEN ne se répète, dans le manga, lorsqu'il est pris en tant que bloc, rien n'est téléphoné! Il n'y a en fait que peu d'arcs: Songoku découvre le monde, le Ruban Rouge, Piccolo, Végéta, Freezer, Cell et Boo. Sept arcs, tous en fait très spécifiques.
Je ne vais pas faire le candide: l'accusation de répétition, d'incapacité au renouvellement, cible en fait seulement les quatre derniers arcs, la partie "Z" de la série. Considérons un instant la série comme une histoire en un bloc, ce qu'elle est en fait.
Végéta est une confrontation courte, plus une introduction de personnage qu'autre chose, à l'échelle de la série. C'est également le premier pas indispensable à la thématique la plus passionnante de tout Dragon Ball: l'opposition Végéta-Songoku, que j'adorerais développer également, mais ici n'est pas le sujet.
Ensuite, Freezer. Une histoire de totalitarisme fasciste dont l'arc permet tout d'abord de donner des origines à la plupart des personnages (Nameks et Sayans, surtout), de transformer Songoku en super-sayan, et d'aborder la puissance sous l'angle de la souffrance (les gains de puissance sont faits dans cet arc en approchant de la mort, rappelez-vous).
Cell: une histoire de refus du fatalisme, que ce soit dans l'histoire post-apocalyptique de Trunks ou dans le refus de Végéta de se contenter de la deuxième place. Une histoire de fatalisme, aussi, avec Songohan qui accompli son destin et devient ce qu'il devait être depuis le début: le vrai numéro un. La puissance est ici abordée sous l'angle de l'inné, contrairement à Songoku qui n'est qu'acquis. Il y a également dans cet arc une réfléxion rapide sur le sacrifice (que Songoku aborde avec bien plus de sérénité que dans l'arc Freezer) et sur l'acceptation de sa nature (Songohan et Cell, qui se désintéresse de sa mission et de sa nature pour ne plus vouloir grand-chose; il est l'ennemi le plus humain de Dragon Ball, le plus désespéré, finalement; il ne veut rien).
Boo: pour moi un chef-d'oeuvre, à la fois conclusion de tous les arcs et retour à certaines sources. Le dernier Boo, le petit, est l'antithèse de Songoku, qui dit d'ailleurs cette phrase: "Tu es incroyable... Te battre seul aussi courageusement... Dans ta prochaine vie, sois réincarné en quelqu'un de bien... J'aimerais me battre seul à seul contre toi... je m'entraînerai d'avantage et je t'attendrai...". L'arc Boo est à la fois une auto-critique de Toriyama, qui pousse au ridicule (SS3 et fusion) la course à la puissance que ses éditeurs lui ont exigée, et un pied de nez glorieux à ce qu'on attendait de lui: les sources ne sont jamais oubliées, et la fin se fait sans fusion, sans SS3. Ces épouvantails commerciaux ne sont agités que quelques chapitres chacun, et c'est finalement un Songoku presque originel qui achève un autre Songoku originel, même si en négatif. Deux personnes qui se battent contre elles-mêmes, chacune incarnant la limite de l'autre. Songoku gagne parce qu'il n'est pas seul, et Boo aurait pu gagner parce qu'il était seul, justement.
Prise comme un bloc uni, la série me semble ne jamais se répéter (aucun affrontement important ne suit le même schéma), et être très fidèle à elle-même dans sa narration. Songoku est le fil rouge, la droiture et la persévérance les thèmes majeurs, et les histoires s'enchaînent les unes aux autres sans jamais être complètement indépendantes. Et puis merde, pour ce qui est de l'effet de surprise... Bordel, j'envie tellement les gosses qui découvrent complètement Dragon Ball... La deuxième mort de Végéta est tellement belle qu'on a toutes les raisons de la croire finale. La série peut être terminée deux fois. le Songoku divinisé qui arrive sur Namek est tellement grandiose dans ce qu'il représente qu'on a toutes les raisons de croire à la fin de l'histoire. Aucun coup de coude complice n'abouti (ni Songohan, ni Trunks, ni Songoten ne deviennent les personnages principaux).
Et même lorsqu'en effet, soyons lucide, la série n'est pas au top de la surprise, l'intérêt reste, le propos ne dévie pas d'un poil, les personnages restent des maîtres à penser qui s'ignorent. Je le disais plus haut: même en connaissant les trente épisodes à venir, on était tous devant la télé le mercredi. Pourquoi? Parce que la simplicité, la pureté de cette histoire dépassait l'histoire elle-même. Dragon Ball, c'est un grand mythe, une histoire qui aurait pu être un livre religieux. Une fresque avec des héros et des monstres, et un écho à une société alors en plein bouleversement. Dragon Ball est le manga qui, je pense, a eu le plus d'impact dans les cités. Et il représente un héros humble, anonyme, qui se fout de tout sauf de rester droit et de se dépasser. L'un des messages de Dragon Ball est "n'abandonne jamais. Reste loyal à tes idéaux et n'abandonne jamais". Je ne suis pas étonné que les cités aient aidé à l'ascension de Songoku au panthéon des personnages de fiction du vingtième siècle.
Enfin, ta dernière critique, sur la non-évolution des personnages... Pfff, quelques simples exemples: Songohan qui devient effectivement le numéro un lors de l'arc Cell, et qui n'arrive pas à apprécier, puis qui redevient le numéro un et arrive à apprécier lors de l'arc Boo. Songoku qui perd de sa pureté lorsqu'on comprend en même temps que lui qu'il a été un mauvais père. Végéta qui fini par se sacrifier pour les autres, puis à accepter d'être le numéro deux.
Par exemples.
Ha, et pour l'humour gamin, ça fait, je pense, partie de la force mythologique des personnages. Ils sont "bons", à l'exception de Végéta et de Piccolo au début, aucun ne doute jamais, ne fait jamais un pas vers l'autre côté. L'histoire ne fait que très rarement cas de leur quotidien, ne nous les présente la plupart du temps qu'en période d'entraînement ou de combat. Dans cette configuration, l'humour dont ils font preuve renforce leur "innocence", souligne la droiture de leurs vies, toutes entières tournées vers le combat contre soi-même. Songoku et sa bande sont des moines combattants, qui ne vivent que pour se dépasser, s'accomplir, s'améliorer. Sans l'humour léger, symbole à mon sens de leurs quotidiens non-racontés, de leurs liens les uns aux autres, de leurs amitiés, ils perdraient je pense de leur innocence, et donc de leur force.
Et au passage, je rappelle quand même que l'humour est loin d'être omniprésent, et n'entache jamais des scènes comme la deuxième mort de Végéta, ou le tabassage de Cell par Songohan. La série est d'une violence extrême qu'on a tendance à oublier, et d'une abnégation dans l'entraînement qui n'a rien de drôle, et tout de philosophique. Et puis les puissances physiques dont il est question dans Dragon Ball n'ont quasiment jamais été surpassées dans une autre d'imaginaire non-créationniste (à l'exception de Tengen Toppa Gurren Lagann, je n'en vois même aucune), et cette escalade de force n'a rien de drôle non plus, même si le grotesque assumé de l'arc Boo en fait quelque chose d'ambigu...
Bon, voilà , un bon gros pavé en guise de premier message, j'espère que ça n'a pas été indigeste... Kraken, ne prend pas ma véhémence personnellement, j'écris sur un forum public, le message s'adresse donc à tous.
Merci aux deux trois personnes qui seront venues à bout de ma diarrhée verbale.