Il est bon de signaler qu'aussi irréaliste que soit l'univers de
Dragon Ball, il apparaît solide, cohérent à son étrange manière (parce qu'il ne prétend pas être crédible ou sérieux), et surtout, il y a une bonne histoire.
Un scénario de qualité, ce n'est pas forcément un scénario bourré d'implications politiques et philosophiques à la Kojima, psychanalytiques et théologiques à la Anno, ou une intrigue effroyablement complexe, ou une narration complètement fracassée avec des allers-retours permanents dans le temps, ou dix mille factions qui s'affrontent...
Il n'y a pas de critères formels quant à la qualité d'une histoire (enfin, il y a de nombreuses écoles de pensée qui prétendent qu'il y en a, des critères formels, mais vous savez quoi ? Elles se contredisent).
Par exemple, beaucoup de scénaristes et romanciers professionnels, bien payés, reconnus, etc, auront considéré Tintin comme un ensemble d'aventures débiles et inconsistantes. Et pourtant...
Bruttenholm, sur le Madforum, a écrit:
C'est la marque de fabrique d'Hergé... Les Tintin n'ont pas une construction dramatique classique : il n'y a pas tant de choses que ça à deviner, l'intrigue se mord la queue dans sa résolution et fait un pied de nez au lecteur : dans Le trésor de Rackham le Rouge, ils parcourent le monde à la recherche d'un trésor qui se trouvait à Moulinsart depuis le début, dans L'affaire Tournesol, Tournesol se fait enlever par des espions cherchant à récupérer un microfilm, microfilm que Tournesol retrouvera à la dernière page de l'album sur sa table de nuit ! Pareil dans Objectif Lune/On a marché sur la lune : le traître dans l'équipage n'arrive que pour dynamiser la toute fin ; avant, Hergé a passé un album entier à raconter les préparatifs du voyage et les trois quarts de l'autre à suivre les déambulations des astronautes... Et pourtant il ne lâche pas son lecteur une seule seconde, grâce à la fluidité de son écriture, son habileté à gérer les micro-péripéties, à enchaîner les scènes burlesques, etc.
Poltermok a écrit:
Ouais, c'est exactement ça ! La trame des Tintin est vraiment pas classique, et parfois pas linéaire du tout (je parle même pas de Tintin chez les Soviets, complètement bordélique). On commence souvent par un acte insignifiant (Tintin trouve une serviette sur un banc : il finit par crapahuter dans les montagnes syldaves pour déjouer un coup d'état ; Milou fouille dans une poubelle : ça finit en Arabie chez des trafiquant d'opium ; Tintin achète une maquette de bateau : il finit par chercher un trésor à l'autre bout du monde ; Tintin prend une correspondance en avion : il rencontre des extraterrestres sur une île tropicale en éruption volcanique ! ... etc) avec des conséquences graves. L'intrigue est difficile à prévoir. Et Hergé peut tout à fait s'accorder des délires personnels : j'ai relu récemment Le Crabe aux pinces d'Or, et Tintin cherche un bout de papier (tombé par terre) pendant DEUX PAGES ! Deux pages !
Un autre signe aussi, c'est le sens du suspense : quand on relit Tintin en Amérique, à chaque bas de page quasiment, ça finit sur un danger ou une menace (dès la première page !). Et souvent ça débouche sur un gag idiot... Hergé est très libre pour gérer ses histoires : j'ai aussi relu L'Île Noire, qui n'est rien d'autre qu'une course-poursuite sur tout un album ! Tintin ça a l'air simple, mais c'est vachement élaboré et tortueux en fait.
La parenthèse sur
Tintin est là pour rappeler qu'une histoire simple n'a souvent rien de simpliste, que ce qui apparaît naïf ne l'est pas forcément (ou, pour être naïf, peut obtenir par là même davantage d'efficacité, souvenez-vous de
Bilbo le Hobbit !), et que d'autres critiques que l'on peut faire sur une histoire ou une autre sont tout autant sujettes à caution.
On va cependant supposer, pour les besoins du débat, qu'il y a des critères formels. Supposons que ce soit :
- La clarté (chronologie, exposition des tenants et aboutissants, identités et positions des différents protagonistes bien délimitées...)
- La capacité à se renouveller
- La constance et la cohérence des thématiques
- L'évolution des personnages
Déjà , on peut remarquer (je le répète encore) que les critères n'ont rien de formel, nous avons tous en tête des récits efficaces qui transgressent certains de ces points : la série
Columbo n'a aucun besoin d'une évolution des personnages !
Mais surtout,
Dragon Ball y répond, à chacun des points ci-dessus, et à bien d'autres encore. Le récit est plus malin qu'il en a l'air, vraiment, on ne doit pas sous-estimer l'oeuvre de Toriyama sous le prétexte que Sangoku n'est pas toujours une lumière et qu'il règle essentiellement ses problèmes à la force de ses poings.
Bref, c'est fini de défendre le manga original (je ne parle pas, plus haut, de la très abusive adaptation animée).
Voici venu le moment que vous attendiez tous, la séance habituelle de railleries sur le film !
La bande-annonce sort en octobre, mais déjà ses images circulent pour illuminer la journée :
(Source :
Nerdorama.)