Un matin de grisaille ? Juste une brume qui s?attarde au dessus de la mer?et peut être un banc de nuage planant près du rivage ou à l?intérieur des terres.En haut de la colline, un arbre excentrique joue l?original : l?arbre blanc dans cette foison de vert. Il dénude ses branches quand les autres se parent, ses longues feuilles un peu biscornues formant autour de lui un tapis de velours ocre et poussière. Quand ces dernières ont enfin disparues, emportées par les alizés ou avalées par la terre, le maître du morne ressemble au corail blanc battu par les eaux dont on retrouve parfois des fragments sur la plage,des bouts de vie marine dont l?aperçu laisse rêveur,et qui ne dévoilent rien, jaloux des secrets de l?eau profonde.
Le ciel se dégage, d?un bleu un peu sale se mêlant aux lambeaux des nuages, boules de suie mêlés de chaux?qui se délitent, pour qu?entrent en scène les rayons de soleil.De la rosée s?accroche aux branches de l?arbre blanc, et une crécelle s?y pend, crissant et glissant sur le tronc, ferraillant sans merci le silence alentour, jusqu?à ce qu?un prédateur ailé passe par là , décidant que l?inopportune irait mieux dans son ventre.Un vent doux s?infiltre sans trouver prise, l?arbre blanc est mince mais solide, ses racines sont bien enfouies? Emportée par la brise, une troupe de merle accoste ce perchoir attrayant, sans obstacle pour tenir un grand concert séant. Mais voilà , les nuages finissent par assaillir la position, et les musiciens s?égaillent en protestant.
L?arbre blanc contemple la mer au loin, totalement dégagée désormais?il détaille la ville blottie près de celle-ci, qui renvoie la lumière, éblouissant désormais tout.Cette attente patiente a cependant un but : le végétal a rendez vous?comment se pourrait-il, lui toujours immobile ? C?est que l?autre protagoniste vient toujours à lui, à la même heure, sans retard d?aucune sorte. Un vrombissement annonce son arrivée; robe moirée, parure de rouge luisante, allure raffinée, le nouvel arrivé le salue puis se pose avec délicatesse sur le point le plus haut de son ami branchu ; un colibri de bon aloi, son déjeuner de sucre perlant encore par endroits.Ils conversent alors, tandis que le début de journée touche à sa fin.
_________________ Pouffe qui l'assume.
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