Je n'ai pas trouvé de topic plus adhéquat pour ouvrir une parenthèse sur cette "forme de littérature", si on peut appeler ça comme ça. Pour ceux qui ne le savent pas, une minorité j'espère, il existe des gens dont le métier est de regarder la télé pour la critiquer.
Je vais donc vous faire part de certaines de ces chroniques télé, en commençant de suite avec mon chroniqueur préféré:
Guy Carlier, passant dans l'émission "le Fou du Roi" sur France Inter (que j'avoue n'avoir écouté qu'une fois, je préfère me procurer les chroniques éditées, car je ne supporte pas Stéphane Bern, animateur de cette émission).
Guy Carlier à deux boucs émissaires de taille: Stéphane Bern, et Julien Lepers. Les chroniques suivantes narrent les frasques de ce dernier, les meilleures à mon sens. Je sais pas si vous avez déjà supporté
Question Pour un Champion avec vos grands-parents, mais regardé au second degré, cette émission est un petit bijou. La preuve en lettres (extrait de
"Nouvelles Chroniques télé & lettres matinales" chez Pocket):
LEPERS Julien.
Avril 1998.
Hier, dans l'émission
« Questions pour un Champion », Julien Lepers nous a fait l'entrée suivante :
« Un immense bonsoir! Un immense bonsoir au public, aux candidats, aux techniciens, et surtout aux ré-dac-teurs-des-ques-tions, bref un immense bonsoir à tous, et quand je dis immense je le pense vraiment, c'est pas comme des fois quand on dit bonsoir comme ça, et qu'on y croit pas vraiment... On dit bonsoir et on pense à autre chose, on se dit: "Tiens,
qu'est-ce que j'ai mangé à midi ?" Non, là je vous dis un immense bonsoir sincère du fond du coeur, un immense bonsoir qui veut dire que maintenant le téléphone peut-bien-sonner, on-peut-bien-frapper
à -la-porte, on-ne-ré-pond-pas-puisqu'on- regarde-Questions-pour-un-champion ! »
Oui je sais, c'est terrifiant. On atteint là une espèce de synthèse ultime de la niaiserie, la substantifique moelle, c'est le trou noir, le big bang, la création du monde, finalement Julien Lepers a raison: il est
Dieu!
Mai 1998.
(...) Hier soir, j'ai craqué. Une pulsion irrésistible m'a poussé à allumer ma télé sur France 3 à 18 h 15. J'étais là , hagard, agité de convul-
sions et traversé de frissons, quand il est apparu en souriant. De suite je me suis senti mieux... C'est ça qui est bien, avec Lepers : il fait effet tout de suite. Il balance son ânerie d'entrée -en plus hier, c'était
de la bonne...
Déjà , rien qu'en le voyant, on ressent comme une chaleur à l'intérieur.
Et puis il a commencé en disant :
"Nous allons faire un beau jeu, des questions, des réponses, on va essayer d'apprendre des choses, même si on les oublie quelques secondes après, ça sert à ça la télévision..."
Voilà , il l'a sortie la connerie. Mais comme il se rend compte de l'énormité de ce qu'il vient de dire, il enchaîne: "Ça sert à ça la télévision... euh... Ça sert à s'informer!"
Là , il réfléchit en plissant le front: "Ça sert à ... Se divertir... Ça sert aussi à savoir des choses..."
Il se rend compte qu'il vient de dire exactement le contraire de tout à l'heure, alors il pense:" Je vais terminer ma phrase à toute vitesse, ils ne se rendront compte de rien", et il conclut: "Ça sert aussi au transfert des connaissances et du savoir ça va Geneviève ? ..." Le " Ça va Geneviève ?" n'a rien à faire
dans cette phrase, mais il avait épuisé tous les mots disponibles en mémoire et ça lui permettait de changer de sujet.
Mai 2000.
En regardant " Questions pour un champion " hier soir, je me disais que Julien Lepers devrait léguer son cerveau à la science, afin que les neurochirurgiens puissent enfin répondre à cette question: " Comment un
cerveau humain constitué de 14000 millions de cellules peut-il sortir autant de conneries ? "
Je vous explique: Julien Lepers reçoit un candidat retraité. Au début tout se passe normalement. Julien lui demande à quoi il passe ses journées et l'autre lui répond: "Je passe mes journées à vivre."
Bon. Là , comme le cerveau de Lepers attendait une réponse du
style "Je passe mes journées à faire les mots fléchés de Maître Capello", il est déstabilisé par la réponse et s'embarque dans une de ses phrases dont il ignore totalement la fin lorsqu'il la commence: "Ah ? Vous vivez... Et... C'est très important la vie, c'est un travail... Et... que pensez-vous justement..."
Et là , il ne sait plus. On voit bien qu'il se demande désespérément ce qu'il va dire ensuite. Alors ça donne exactement ça:
"Que pensez-vous justement... Est-ce que... Est-ce que... Euh... Vous êtes obnubilé par la mort ? Vous y pensez beaucoup?"
Autant vous dire que ça a jeté un froid sur l'émission! À cet instant en France, 9247 retraités venaient de mettre la tête dans leur four et d'allumer le gaz !... Le candidat, tétanisé, se dit: "Bon, je vais me mettre au niveau." Il lui répond:
"Je trouve que c'est un faux problème, parce que quand on est vivant on n'est pas mort." Lepers réfléchit: "Oui...oui...oui... Quand on est vivant, on n'est pas mort."
Je vous rappelle que 14000 millions de cellules travaillent pour ça ! D'ailleurs le candidat devait penser la même chose que moi puisqu'il a conclu :
"Eh oui, il faut vivre, mais c'est pas facile car quand on se regarde, on se trouve assez médiocre. Je
ne dis pas ça pour vous, Julien !..." Non, tu parles !
C'est pas mal hein ? Et lorsqu'on pense que ça se passe presque comme ça tous les soirs sur France 3, on a presque envie d'enregistrer chaque émission pour se fendre la gueule.