Je suis partisan des claques (ou plutôt de la claque, l'effet psychologique d'une unique baffe peut être important, avec la peur précédant la brève douleur). Et rares, bien entendu, uniquement en cas de bévues graves de la part de l'enfant, afin de l'aider à clarifier son système de références en intégrant bien que casser un verre cause la punition.
Par contre, je m'élève contre les fessées. Je considère, d'une part, qu'elles relèvent de l'humiliation inutile (l'enfant a déjà droit à la douleur, inutile de lui infliger la nette conscience de son impuissance face au châtiment parental) et, d'autre part, qu'elles peuvent créer des traumatismes chez l'enfant. Les fessées déculottées, c'est pire encore, humiliation doublée, et en plus, on renverse le système de valeurs qu'on essaie de lui inculquer (il faut être habillé, tout du moins en public...
Ne parlons pas des implications psychanalytiques de la fessée. Je vais ici laisser la parole à monsieur Rousseau.
Jean-Jacques Rousseau a écrit:
Comme mademoiselle Lambercier avait pour nous l'affection d'une mère, elle en avait aussi l'autorité, et la portait quelquefois jusqu'à nous infliger la punition des enfants quand nous l'avions méritée. Assez longtemps elle s'en tint à la menace, et cette menace d'un châtiment tout nouveau pour moi me semblait très effrayante; mais après l'exécution, je la trouvai moins terrible à l'épreuve que l'attente ne l'avait été: et ce qu'il y a de plus bizarre est que ce châtiment m'affectionna davantage encore à celle qui me l'avait imposé. Il fallait même toute la vérité de cette affection et toute ma douceur naturelle pour m'empêcher de chercher le retour du même traitement en le méritant; car j'avais trouvé dans la douleur, dans la honte même, un mélange de sensualité qui m'avait laissé plus de désir que de crainte de l'éprouver derechef par la même main. Il est vrai que, comme il se mêlait sans doute à cela quelque instinct précoce du sexe, le même châtiment reçu de son frère ne m'eût point du tout paru plaisant. Mais, de l'humeur dont il était, cette substitution n'était guère à craindre: et si je m'abstenais de mériter la correction, c'était uniquement de peur de fâcher mademoiselle Lambercier; car tel est en moi l'empire de la bienveillance, et même de celle que les sens ont fait naître, qu'elle leur donna toujours la loi dans mon coeur.
Cette récidive, que j'éloignais sans la craindre, arriva sans qu'il y eût de ma faute, c'est-à -dire de ma volonté, et j'en profitai, je puis dire, en sûreté de conscience. Mais cette seconde fois fut aussi la dernière; car mademoiselle Lambercier, s'étant aperçue à quelque signe que ce châtiment n'allait pas à son but, déclara qu'elle y renonçait, et qu'il la fatiguait trop. Nous avions jusque-là couché dans sa chambre, et même en hiver quelquefois dans son lit. Deux jours après on nous fit coucher dans une autre chambre, et j'eus désormais l'honneur, dont je me serais bien passé, d'être traité par elle en grand garçon.