Tu connais probablement ce passage, mais je le mets quand même, "pour la présentation" :
Niet a écrit:
La volonté du vrai, qui nous induira encore à bien des aventures périlleuses, cette fameuse véracité dont tous les philosophes ont toujours parlé avec beaucoup de respect, que de problèmes elle nous a déjà posés! Et quels problèmes singuliers, pernicieux et équivoques! L'histoire en est déjà longue, cependant il me semble qu'elle ne fasse que tout juste de commencer. Quoi d'étonnant si nous finissons par nous méfier, par perdre patience, par nous détourner, excédés? Si ce sphinx nous enseigne finalement à poser des questions à son tour? Qu'est-ce en nous qui veut la "vérité"? De fait, nous nous sommes longuement attardés devant le problème de l'origine de ce vouloir, et pour finir nous nous sommes trouvés complètement arrêtés devant un problème bien plus fondamental encore. Nous nous sommes interrogés sur la valeur de ce vouloir. En admettant que nous voulions le vrai, pourquoi pas plutôt le non-vrai ? Ou l'incertitude? Ou même l'ignorance? Est-ce le problème de la valeur du vrai qui s'est présenté à nous, ou bien est-ce nous qui nous sommes offerts à lui? Qui est Å’dipe ici? Et qui est le Sphinx? Il semble que ce soit un rendez-vous de questions et de problèmes. Et le croirait-on? il nous semble en définitive que le problème n'avait jamais été posé jusqu'à présent, que nous somment les premiers à le voir, à l'envisager, à l'oser. Car il comporte un risque, et peut-être le risque suprême.
Ce qui ne nous avance pas à grand-chose, mais fait néanmoins joli.
Cela à sans doute déjà été dit dans le sujet Nihilisme,
mais l'accélération brutale, la collision avec le mur et le séjour à l'hôpital.. sont généralement plus productifs que le doute systématique (..pour la recherche de la Vérité, et non du bonheur ou autres conneries du genre).
De la même manière qu'il ne faut pas rechercher le bonheur, mais le fameux But qui engendre le bonheur, il ne faut pas tant rechercher la Vérité que les
expériences qui seront le matériau de construction de la Tour de Babel s'élançant vers elle (...). Il ne faut donc pas hésiter à s'investir dans un vaaaaste projet, aussi imparfait soit-il, car il fournira de toutes manière une exemple solide qui servira de base à de futures réflexions (j'ose prendre l'exemple des... Nazis). Bien sûr, pour que cela soit "éthiquement" viable (et que le monde ne devienne pas une bouillie de sans-butisme), il faut qu'une partie de nous soit assez peu
ironique pour y Croire, mais néanmoins assez
ironique pour maintenir un souci de dépassement. Donc, plutôt que de rechercher la Vérité à tout prix, il vaut mieux rechercher cet
équilibre dans l'Ironie.
Cette volonté que tu évoques de retourner à la base des bases, de rechercher l'absolument certain et le parfaitement fiable, me fait penser à cette vieille conception poussiéreuse (et grecque) selon laquelle un Philosophe est un vieux barbu qui se coupe du monde pour aller méditer dans sa grotte. A mon humble avis, il ne parviendra qu'à se rendre incapable de s'exprimer et de réfléchir sur quoi que ce soit, tout juste bon à subsister vainement en bouffant quelques groseilles. Et ceux qui écrivent de pareilles âneries se contredisent jusque dans leur propos, car la
seule chose qui leur permette d'étaler leur science et de développer leur pensée est bien la masse d'exemples que leur fournit ce monde "futile et dépravé" (ingrats qu'ils sont). On retrouve ce vain perfectionnisme dans le mode de vie qu'ils prônent : une existence étriquée se contentant du strict minimum, mais pour être
Ssssûr et
CeRtAiN de la remplir *parfaitement*. Un peu comme si un athlète en puissance se faisait balayeur des rues pour être
sûr de ne pas oublier une seule feuille. Ridicule, non ?
ET je ne pense honnêtement pas que l'on puisse assimiler l'Humaine Condition aux mathématiques, étant donné que tout ce que peut engendrer l'esprit humain est
*par définition* trop limité pour attreindre sa propre compréhension (c'est obscur, mais je n'appréhende moi-même pas... parfaitement
<-- illustration par le paradoxe). Par contre, on peut trouver plein de métaphores mathématiques en Philo, mais ce n'est pas le sujet pour en parler.
Donc, oui, c'est sans doute une utopie que de vouloir "tout reprendre à zéro", car on ne devient pas potier en perfectionnant à mort son premier vase. Et s'il faut "tendre" vers quelque chose, c'est sans doute plus vers l'équilibre dans le Doute que vers l'un des deux extrêmes, me répète-je (c'est, en quelques sorte, une
dérivation mathématique du principe de l'Ironie - pour joindre le parallélisme spécieux à la parole).
Ah, et pour une fois, j'aimerais avoir l'avis de DragonNoir sur la question.