J'ai achevé la vision de la série (deux saisons, d'après les concepteurs, quatre, à en croire les génériques) "Fullmetal Alchemist". Je vais étayer ma brève opinion de quelques illustrations.
Je n'ai pas tardé à me rendre compte que je m'étais interrompu en plein pic dramatique, lors de l'un des meilleurs moments de la série, juste avant une baisse radicale de qualité... c'est-à -dire au Laboratoire numéro 5.
Après ce passage, tout s'effondre, notamment dans la conclusion d'un certain épisode où l'on voit les antagonistes de nos héros, en habits d'Alchimistes d'Etat, s'enfuir sans problème... bien sûr, un Homunculus nain et obèse, c'est tellement discret en uniforme militaire !
Edward Elric et Scar le Banni en plein duel.
Que vaut cette série, au final ? Comme nombre d'oeuvres actuelles (souvenez-vous,
"Metal Gear Solid 3 : Snake Eater"), elle s'essouffle très vite, trop vite ! Une mauvaise gestion du rythme conduit à une étrange alternance entre des passages dépourvus de tout intérêt narratif et de beaux enchaînements de scènes trépidantes, où la mise en scène acquiert une rare emphase.
Les Alchimistes d'Etat se distinguent par une grande rigueur administrative.
L'aspect comique n'est pas oublié, et je ne sais pas si c'est toujours une bonne chose... en fait, il se pourrait bien que le trop-plein d'humour nuise à la série. Même le grand Fellini tomba jadis dans le piège de la dérision excessive : souvenez-vous de certaines scènes de ses films où l'émotion est soudain brisée par une pique malheureuse. Si ce cinéaste, spécialiste des partis pris risqués, jouait un jeu dangereux et le savait, les concepteurs de "Fullmetal Alchemist", eux, ne semblent guère avoir conscience de ce qu'ils font exactement. Est-ce une quête épique ? Une simple enquête administrative ? Une histoire aux sombres ramifications politiques ? Ou une série légère, comme tendraient à nous le faire croire le comique et l'aspect caricatural de certains protagonistes ?
Quoi qu'il en soit, les gags sont parfois malheureux, même si cela s'arrange vers la fin de la série...
L'officier Armstrong, qui n'a pas volé son nom, est le plus grand symbole de la force virile équivoque dans la série.
Ainsi, Armstrong se révèle être l'incarnation d'un esprit parodique, à la limite du sentaï, qui n'a tout simplement pas sa place dans des scènes sérieuses... et pourtant, les scénaristes choisissent de l'impliquer dans des événements tragiques. C'est l'exemple même de la maladresse inhérente à la plupart des épisodes de la série : une difficulté à gérer l'équilibre délicat entre comique et dramatique, qui ont parfois tendance à se gêner l'un l'autre...
La pierre philosophale, objet des convoitises de la majorité des protagonistes.
Une autre faille de la série est son trait. Voilà un style manga assez original, puisqu'il renonce aux grands yeux : les regards de "Fullmetal Alchemist" sont parmi les plus fins qu'il ait été donné de voir. Les expressions, du coup, sont plus naturelles, plus proches de la morphologie faciale d'un être humain réel. Revers de la médaille : le travail sur les regards n'est pas toujours idéal.
Dans l'ensemble, son originalité graphique, l'oeuvre la paie très cher. La grand-mère de Winry ainsi que Gluttony paraissent bien déplacés dans l'univers de la série. Et surtout, les dessinateurs ont manqué de références, d'entraînement sur cette patte bien particulière, ce qui a des conséquences parfois catastrophiques... et je soupçonne le studio d'avoir fait appel à l'occasion à des contractants extérieurs pour boucler le travail en retard. Vive la sous-traitance ?
L'illustration vivante des ravages de la sous-traitance, si c'est bien de cela qu'il s'agit.
Cependant, comment expliquer autrement que les dessins soient parfois si bâclés, les faciès si difformes ?
Très bon point : les Homunculus. Des antagonistes humains, sensibles, dont chacun a sa particularité et ses raisons d'agir. Certes, leurs motivations très stéréotypées n'apparaissent pas marquées du sceau de l'inventivité la plus débridée, mais le traitement concis appliqué à ces raisons d'agir excuse leur mentalité... cliché. Léger regret : leur comportement n'est pas adapté à leur nom.
L'apparence des Homunculus est excellente. Si j'ai dit du mal de Gluttony plus haut, c'était en raison de son "incompatibilité" graphique avec le style des autres personnages... mais pris à part, son corps difforme et couvert de valves est bon en soit. C'est pareil pour les autres, mis à part Pride, peut-être, dont la tenue d'Homunculus, que l'on ne voit que quelques instants dans l'un des derniers épisodes, est ridicule et bâclée (bravo pour les bretelles, on croirait un maillot de bain du siècle dernier).
Sloth est peut-être la plus fourbe des sept Homunculus.
En conclusion, un animé mi-figue mi-raisin, et un tableau bien noirci par une tendance générale à bâcler les conclusions, à faire des cliffhangers inutiles (un ou deux de temps en temps, c'est bien, mais lorsque un tiers des épisodes de la série s'achève par un "A suivre" moqueur en pleine scène primordiale, on ressent une certaine lassitude) et à lancer sans y prendre garde des contradictions avec des éléments antérieurs du scénario.
Une bonne oeuvre, oui, mais on regrette ces mille et une imperfections.
Wrath, le plus pathétique des Homunculus, n'a pas volé son nom.