Concernant Buffy, je l'ai visionnée à l'époque bénie de la "trilogie du samedi" sur M6. Mais siii, souvenez-vous, trois séries fantastiques, chaque samedi soir, sur M6... Bon après c'est un peu parti en sucette - et je ne sais pas si ç'a survécu de quelque façon que ce soit jusqu'à aujourd'hui.
Hem. Bref. Oui, Buffy donc.
Mes premières réactions ont été plutôt négatives. De manière générale, j'aime assez peu le burlesque et le kitch, et la série semblait être bâtie uniquement avec ces briques.
Un peu par la force des choses (Buffy ne passait pas en dernier mais en premier dans la trilogie, donc en attendant les épisodes des autres séries, il fallait bien faire quelque chose, et faire le mollusque devant la TV une heure de plus ou de moins...), j'ai continué à regarder, et j'ai révisé mon jugement. Effectivement, c'est bourré de burlesqe, effectivement, c'est kich, mais il y a une chose qui rachetait tout ça : c'était volontaire et parfaitement assumé. Le loup-garou pour le costume duquel on a piqué tous les paillassons du voisinage pour les coudre ensemble, l'avalanche de clichés autour de la vie sociale dans le lycée étasunien lambda... tout ça était parfaitement volontaire, c'était de l'auto-dérision, à prendre au douze millième degrès. Et là tout de suite, ce n'est plus ridicule, comme peut l'être un démon de Charmed qui se fait couronner seigneur du mal dans un salon dont les murs ont été recourts de carton-pâte pour figurer de la roche ; c'est DRà”LE.
Bref, Buffy jouait parfaitement son rôle de petite série divertissante, amusante, en un mot : sympa.
Puis... "avec de grands pouvoirs viennent de grandes responsabilités". Oups, excusez-moi, c'est pas ça. "Le pouvoir absolu amène la corruption absolue". Bon, c'est pas exactement ça non plus, mais l'idée y est. En clair, pour moi, la série a été victime de son succès.
Cela fait longtemps, je serais donc bien en peine de donner des numéros de saison, mais en gros, c'est vers celle où la bande quitte le lycée et que certains intègrent le campus universitaire, que l'évolution de la série m'est devenue insupportable.
D'une série au kitch assumé, et même revendiquée, dédiée à faire sourire par son auto-dérision, on s'embarque soudainement, sans trop être prévenu, dans un truc qui se veut sérieux et mature. On continue à utiliser le même style pour la plupart des trucs, mais on voit lentement se glisser les moyens techniques qui découlent de la croissance de l'enveloppe du budget - par exemple des effets spéciaux réalisés sur ordinateurs qui ne sont pas pixellisés et se veulent crédibles.
Le mot est lâché. Buffy commence à se vouloir crédible. A vouloir montrer de manière plus ou moins allégorique et symbolique - bref foireuse dans une série comme celle-là - certains aspects de la réalité. Pour les détails, passez sur certains forums Buffy, vous y verrez les fans se branler consciencieusement pour expliquer que tel truc dans tel épisode dénonce en fait l'absence de conscience écologique dans la population étasunienne moyenne, par exemple.
C'est bien gentil de vouloir sauver les baleines, mais moi, je ne regardais pas Buffy pour ça. Je ne pense pas que quiconque le regardait pour ça. La forme de la série a été conservée - avec sa tueuse, concept de personnage aussi cliché que peut l'être un super-héros, sa ville môôôdite, Sunny Dale, qui fait de la concurrence à Washington, ville cible des envahisseurs ET, elle, etc. - mais l'esprit de la série, le fond, s'est barré avec son cachet et est parti faire la manche sur le Sunset Strip d'Hollywood.
Buffy, devenu série se voulant crédible et d'une certaine façon en phase avec la réalité, accumule les lourdeurs, les parasites, les trucs qui encombrent et font chier, en clair : ce n'est plus drôle. C'est ridicule, c'est pathétique. C'est burlesque et c'est kitch sans vouloir l'être, pire, en ne croyant pas l'être, en clair : c'est exactement ce que je déteste.
Comme ça coïncidait avec l'époque où le concept de "la trilogie du samedi" se barrait lui aussi en couilles mais pour d'autres raisons, j'ai arrêté de regarder à peu près à ce moment-là .
J'ai eu l'occasion de voir des bouts des saisons suivantes à droite, à gauche, en divers occasions, qui ont confirmé mon ressenti sur l'évolution de la série.
Mais l'ultime preuve, pour moi, est venue de la saison 7. Quand j'ai appris qu'elle était prévue pour être la dernière, j'ai cédé à une impulsion plus ou moins sentimentale et j'ai décidé de la regarder.
Festival de bourrinisme et de guimauve pitoyable, le scénario se veut instaurant une sensation de désespoir croissant et y parvient très bien, mais pas là où il le croit. Pour ceux qui ont suivi les saisons précédentes avc assiduité, la transition a pu se faire en douceur, mais pour moi qui suis pour ainsi dire passer pratiquement sans paliers de décompressions de la saison 3 à la 7, la différence est claire et nette, et le choc... inoubliable.
Bref, Buffy, une série qui ETAIT sympa et le serait resté si elle n'avait été victime de son succès, à mon avis.
_________________ Il est facile de distinguer les jours où je suis de bonne humeur de ceux où je suis de mauvaise humeur : les premiers, je me définis comme obscurantiste et professe que l'Humanité a désespérément besoin d'être ramenée au niveau technologique d'il y a trois siècles ; les autres, je me définis comme nihiliste et professe que le meilleur avenir auquel l'Humanité puisse aspirer, c'est une extinction sans douleur.
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