Je suis allé regarder ce film avec le coeur empli d'espoirs et de crainte mêlés. Ayant vu la quasi-totalité des oeuvres de
Terry Gilliam, je connaissais le talent de ce metteur en scène. Mais cet
a priori positif était tempéré par une bande-annonce aseptisée et sans originalité, me faisant craindre plus que tout un banal film hollywoodien. Gilliam se serait-il "rangé", tel Burton en son temps avec une poignée de films fades et douteux ?
Ben non.
Si le scénario est simple voire simpliste, le réalisateur se jette tout entier dans cette oeuvre comme dans les autres. A la lisière du simple film de commande, certes, effleurant dangereusement le compromis afin de calmer un front de producteurs excédés par les précédents bombardements du fauteur de troubles, "Les Frères Grimm" n'en est pourtant jamais convenu. Au contraire, en mariant son ton personnel à une trame plus ordinaire, Gilliam parvient à des merveilles (témoin le pseudo-cliffhanger final, héritage d'une légion de films d'horreur miteux se terminant sur un "A suivre" autant que pied de nez aux fins heureuses à l'Américaine). Tout le film est du même tonneau : une oeuvre iconoclaste revêtant des atours de long métrage pop-corn, variant les effets, les critiques, l'humour, avec un entrain et une franchise qui désarment très vite le spectateur et l'amènent à abandonner sa réserve pour plonger sans frein dans la narration.
Pourvu de références bien placées à une myriade de contes, bourré de niveaux de lecture, facile à suivre et agréable à regarder, une oeuvre magistrale. Pas le meilleur Gilliam, mais l'un des plus énergiques.
On ne regrette que l'absence du statut de brûlot rageur. Le réalisateur nous avait habitué à des choses plus emphasées.