Je dois avouer que ma position dans le débat est assez bien arrêtée (ça fera plaisir à Sarko) : je n'aime pas la chanson française. Pour moi, elle est plus souvent qu'à son tour l'incarnation de tout ce que le "génie français" recèle de pire. Mais effectivement, j'y préfère largement Brel. Même si lui non plus ne peut s'empêcher d'être parfois un peu, comment dire ? Canulant. Le premier qui chante "Ne me quitte pas",
je l'empale.
La bonhomie ? Oh, je la vois dans cette mièvrerie de Brassens, son côté "vivons d'amour et d'eau fraîche", amertume ou pas. Ah oui, il y a aussi le fait que Brassens est un avatar du "tropisme méditerranéen", comme disent les géographes, ou comme je dis moi, de la méridiomanie. Or, étant bien plus anglomane du XIXème que méridiomane de la fin du XXème, je brûle pour le nord tandis que le sud me laisse froid (ah, ah).
Mais comparer Brassens à Picasso, tout de même, c'est vache pour Brassens, DN (d'ailleurs, sur le sujet, je n'ai même pas besoin d'une phrase, mais de deux mots : "art dégénéré"
). Il est vrai que les deux m'énervent dans leur toute-présence méditico-consensualiste. Mais l'approche de Brassens est loin d'être aussi risquée que celle de Picasso. Il a beau parler d'enculer dans une chanson (j'en connaissais moi-même une où il baise sa grand-mère pour ne pas perdre son argent au bordel), ça reste très consensuel dans la provocation. La chanson porno/scato, ce n'est pas nouveau, au contraire ça a toujours bien marché. Apporter ça dans les oreilles du bourgeois n'est jamais que faire comme ces types qui exposent des bidets. C'est prétendre faire de l'art avec quelque chose qui n'en est pas, qui existait mais pas en tant qu'art. Mais dans le grand mouvement de "tolérance", ou devrais-je plutôt dire de décadence, artistique du XXème siècle, ça n'a rien de difficile. Au contraire, c'est tout bon, coco.