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LE VISUALEUX
Le fan de rock visuel, ou « visualeux », est une véritable machine à remonter le temps. Lorsqu'on le rencontre, il ne peut s'empêcher de vous parler d'artistes morts ou complètement oubliés au Japon depuis presque dix ans. Le visualeux ne retient rien de l'actualité musicale actuelle, mis à part ses rares fossiles encore en activité et obligés de s'auto parodier pour continuer de vivre, Dir En Grey en tête.
Le visualeux tourne en rond, il stagne dans une période révolue, comme ces Japonais qui pensent encore que la chanson française ne se compose que de Sylvie Vartan, Jane Birkin ou France Gall... Ses sites ne sont que des archives, des images du passé, jaunies, défraîchies. Pas ou peu de news, juste des annonces de best of, de séparation, de décès ou des dates d'anniversaires très nostalgiques. Taxidermistes dans l'âme, ses idoles sont, et seront toujours, X Japan, Luna Sea, Malice Mizer et surtout Hide comme porte-parole du mouvement et passé au rang de mythe car arraché à la vie trop tôt par une sournoise attaque de serviette radio-active...
Le visualeux ne pourra jamais passer à autre chose. Dans 20 ans, il continuera de se débarrasser de ses pellicules à grands coups de « head banger » au son des mêmes disques bruyants et sera toujours bloqué sur ses Zaza Napoli en version zombie et autres mecs en porte-jarretelles. Certaines vont même jusqu'à les trouver beaux ! « Mana sama, tu es si mignon, hi hi hi ! » Pauvres filles...
Le rock visuel, appelé également visual rock ou visual kei suivant le taux de snobisme de ses fans, se définit comme un courant 100% japonais. Il faut rire ! A part le walkman, les Japonais n'ont jamais rien inventé en musique ! Ils piquent des trucs qu'ils améliorent plus ou moins ensuite, nuance ! Quand on a un peu de culture musicale, ce qui est rare parmi les fans de musique japonaise, on s'aperçoit de suite que le rock visuel, c'est du pudding ! Pour la zik, on pique tout au hard FM américain des années 80, comme Def Leppard, Motley Crue, Poison ou Cinderella par exemple. Quant au maquillage et autres fringues de tata, le rock visuel doit tout au glam rock des années 70 (Marc Bolan de T-Rex, Roxy Music et autres David Bowie période Ziggy Stardust et Aladdin Sane), sans parler d'Alice Cooper et de Kiss pour le côté grand-guignolesque et de quelques touches de gothiques voire même de new wave. Notons également que Poison ou Cinderella, très connus au Japon, jouaient également à fond la carte des maquillages, coiffures à la Jem et les Hologrammes et autres talons hauts au moment même où le visuel naissait. Que seraient les fans de visuel sans les Anglo-saxons ?
Avant l'illumination, ou plutôt le plongeon dans les ténèbres, le visualeux n'était rien. Un(e) étudiant(e) noyé(e) dans la masse. La même coupe de cheveux, le même sac à dos, le même pantalon de taille 52... Mais après la rencontre avec la divine musique, il est transformé. C'est Jex Four N°2 ! « Avant j'étais moche, ma vie était un enfer...» Le rock visuel chamboule tout ça. Les filles s'habillent désormais en cadavre, osent les tenues excentriques, surtout quand elles sortent à plusieurs, ce qui permet de se cacher derrière les autres... Les mecs s'épilent les sourcils, se maquillent, laissent pousser leur tignasse, envisagent la pose d'un butt plug et se font casser la gueule dans le métro... La copocléphilie faciale et autres impressions épidermiques permanentes se succèdent sur leur corps-cobaye et sont offerts pour les anniversaires et autres fêtes de fin d'année par des parents dépassés, manipulés et qui en étaient restés au brillant à l'oreille. Parfois même, le visualeux rencontre d'autres visualeux et se fait ainsi des amis, chose qu'avant, il n'avait pas. Il s'essaye à la guitare électrique aussi. Il a enfin trouvé un but, du moins pour les cinq prochaines années, juste avant de passer son BAC... Que dire de plus de ces gens sans aucune personnalité et qui mordent à l'hameçon d'une mode exotique, bien que totalement dépassée au Japon ? Possédant un énorme complexe d'infériorité, et n'ayant pas de talent particulier pour briller en société, ils misent tout sur l'apparence extérieure, une sorte d'armure étincelante censée les protéger et masquer leur vide intérieur. Ils sont les seuls à y croire, leurs parents soupirant vaguement à leur vue en se disant que c'est l'âge bête et leur entourage profane attendant qu'ils aient tourné les talons-aiguilles pour se foutre de leur gueule en riant très fort...
Les figures les plus emblématiques du rock visuel étant en état de décomposition sérieusement avancée, ou séparées depuis déjà pas mal d'années, les anciens fans se sont retrouvés un peu embêtés au bout d'un moment. Plus de news ou presque. Comment prolonger la fête et retrouver cette ambiance de quasi monopole qu'ils détenaient sur la musique japonaise au milieu des années 90 en France, grâce au matraquage intensif, voire fasciste, d'une boutique minable de manga du 11e arrondissement ? Les plus accros ont commencé par lorgner du côté de la scène visuelle « indies » japonaise. En réalité, ils n'ont pas eu trop le choix vu qu'à l'heure actuelle, le rock visuel ne peut survivre que dans l'indies puisque ce courant est mort et enterré au Japon niveau majors. Hélas ! sur des milliers de débutants, combien passeront-ils à la trappe faute de talent ? Entre massacrer ses idoles et faire preuve d'originalité et de talent, il y a un monde.
En parlant de massacre, quelques comiques occidentaux nés ont franchi le pas en montant leur propre groupe amateur de rock visuel, des « copy bands » comme on les appelle. Après avoir dévalisé la trousse à maquillage de leur petite s?ur et l'armoire à fringues de leur grand-mère, ou l'inverse parfois, les visualeux qui ont un peu trop regardé leurs DVD d'X Japan en live pourront reprendre, en braillant d'une voix fausse, monocorde et en yaourt, des paroles dont ils ne comprennent pas la signification sans parler des nombreux couacs aux instruments. A voir absolument avant de crever !
Le visualeux a légèrement retourné sa jupe depuis quelques temps. Durant la période 1995/1999, il a tout tenté pour nous faire croire que la seule musique qu'il y avait au Japon n'était que du rock visuel. La Jpop ayant définitivement pris sa revanche, après avoir été occultée pendant des années par ces mêmes visualeux signalons-le, sa nouvelle stratégie est de dire publiquement que sa musique est très underground et assez peu connue là -bas. On sent là un besoin de garder ça pour lui, une sorte d'égoïsme très enfantin, et cela sous-entend fièrement aussi que, comme c'est pas connu, c'est forcément bien. Le message à décoder est celui-ci : « Moi, j'écoute de la musique indies et non commerciale, pas comme vous! » On évitera de lui dire que, lorsque l'on va dans un magasin de musique au Japon, les Cd de Dir En Grey se retrouvent toujours dans les bacs Jpop... De toute façon, la soi-disant musique indies n'est en fait qu'une ruse des grosses boîtes de disques. Tout ça alimente les mêmes caisses. C'est juste une arme marketing. L'indies flatte simplement le côté rebelle des cons.
Force est de reconnaître que le rock visuel a bien du mal à mourir définitivement en France. Il a fallu que ça tombe sur nous. Les fans les plus accros à ce machin puant la charogne n'ont pas les yeux bridés. On trouve des tonnes d'Occidentaux bien plus au fait des bas-fonds japonais que la majorité des nippons, pour qui ce courant musical n'est plus qu'un très lointain souvenir et provoque bien souvent l'hilarité chez eux en apprenant que des gens écoutent encore ça. Pourtant, des tas de gamines en France, bien emmenée par l'hallucinant mouvement des gothiques-lolita (voir plus bas), continuent de découvrir la musique japonaise par l'entremise de X Japan alors qu'elles avaient encore de la crotte au cul lorsque Hide faisait pousser de la mandragore... Grâce à elles, on assiste à des scènes souvent surréalistes. Agées le plus souvent de 12 à 15 ans, elles n'hésitent pas à emmener avec elles, aux rares concerts européens de leurs épouvantails fétiches, leurs parents, un peu à la manière de la précédente génération qui venaient voir en famille Hélène sans ses garçons à Bercy... Après tout, c'est normal, ce sont toujours papa et maman qui payent leur place et puis ces derniers veulent s'assurer que leur bout de chou ne risque rien dans cette faune de rebelles bien qu'ils soient tous issus de la classe des petits bourgeois... Le mieux est encore de laisser tranquille cette tribu d'empaillés. Ils savent d'instinct que leur temps est compté et ils se sont déjà parqués eux-mêmes dans des enclos spécialement adaptées à leurs besoins auditifs, comme le Piano-Vache ou La Loco par exemple...